Une règle importante : regarder et être sensible aux personnages. Ce sont eux qui donnent les règles de la lumière. La lumière se construit dans une globalité (scénographie, comédien, texte, metteur en scène…) et une entité créée par une cohésion d’êtres. Une création est toujours une aventure humaine. Le temps, la présence et l’implication dès la première lecture du texte facilitent et dirigent la création lumière. Cela me permet de construire mes sensations.
2/ Les relations avec le metteur en scèneLe metteur en scène n’est pas omniscient. Je suis au service de son idée, du message. Mes propositions d’éclairage peuvent aller au-delà de sa recherche. Aussi, savoir écouter, comprendre l’autre et faire preuve d’empathie est la première base.
La relation avec le metteur en scène est aussi extra-professionnelle : les discussions informelles autour d’un verre, par exemple, facilitent la cohésion. Cette cohésion est un paramètre fondamental dans la réussite d’une création.
Dans un nouveau lieu, la peur de l’inconnue est forte. Je fais confiance au régisseur. Il connaît sa salle, son espace, son matériel. Je lui raconte mes idées, et il me fait des propositions. La compétence du régisseur et des électriciens est importante pour la sérénité de mon travail. Je peux alors me consacrer à la création.
4/ Quelles compétences techniques sont nécessaires et quelles seront les évolutions de la technique ?Les différentes sources lumières doivent être maîtrisées dans leur utilisation. Connaître les pupitres de commande (jeu d’orgues) me permet d’avoir un langage commun avec le régisseur. Les automatisés sont utiles dans la création. Il en existe un très large choix, de la simple trichromie jusqu’aux découpes motorisées. Mais ces appareils restent chers et sont souvent bruyants, ce qui est gênant au théâtre. Ils rendent les tournées plus complexes parce qu’il faut tourner avec le matériel et avoir un temps de programmation assez long.
5/ Courant de pensée et maîtres de référenceJ’ai rencontré Henri Alekan à l’occasion d’un stage. Il m’a ouvert les yeux sur la relation entre la lumière et la nature, sur le décryptage de la lumière dans la peinture. Je m’inspire des artistes (peintres, photographes) qui utilisent la lumière comme matière. George de la Tour, Edouard Hopper, Zurbaran, Matisse,… A chacun son approche du travail de la lumière.
6/ Quel est l’avenir de la conception lumière ?La conception existera toujours tant qu’il y a de l’humain et des êtres qui composent le spectacle vivant. Les moyens techniques font évoluer la conception et nous devons les utiliser avec réflexion, à bon escient. Mais les bons vieux bricolages de bouts de ficelle et couvertures de survie seront toujours de mise.
7/ Expression libreChaque spectacle et représentation sont uniques. Un spectacle est fait par des êtres, pour d’autres êtres. Il s’adresse à la part de fragilité et d’émotions de chaque spectateur. Il y a une rencontre humaine entre l’artiste et le spectateur. A l’issue d’un spectacle, un spectateur m’a dit : « pendant une heure, j’ai eu l’impression d’avoir 10 ans ».